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La harpe du driseoc
28 septembre 2011

Voyage au royaume d'Hadès ...

mythes-grec-latins

Il n'y a, à première vue, pas beaucoup de héros de la mythologie antique gréco-latine qui soient descendus au monde des morts en en soient remontés. C'est d'ailleurs la même chose sous la plupart des autres cieux mythologiques. Je crois pouvoir dire sans trop m'avancer qu'il en va de même dans le monde réel, tangible et historique, mais je n'irai pas prendre le risque (ou la peine) de m'en assurer.

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Pourtant... Pourtant... On peut évoquer le cas d'Ulysse (alias Odysseus), descendu là consulter le devin Tiresias afin de rentrer chez lui. Egalement descendu et remonté: Orphée. Et même sans trop de mal, mais sans au bout de tout ça ramener son Eurydice dans le monde des vivants (il n'aurait pas dû se demander si elle le suivait bien). Est doublement descendu aux Enfers Hercule (Héraklès), une première fois pour aller emprunter le chien Cerbère, une deuxième fois pour ramener l'épouse d'un de ses amis veuf beaucoup trop inconsolable. Est enfin descendu pour raison oraculaire Enée.

Finalement, on entre et sort dans le monde des morts comme dans un moulin...

L'Enéide (Virgile) est un texte beaucoup plus tardif que beaucoup d'autres traditions, et qui a repris pas mal d'éléments de l'Odyssée.

Enée est un prince troyen, c'est à dire qu'il est originaire de la ville d'Illion, la cité de Priam. Il a survécu à la célèbre guerre par la protection de sa mère, la déesse Aphrodite (pourtant pas la plus indiquée pour veiller sur un prince guerrier) et mène ses gens en suivant fidèlement les indications des oracles. Indications qui, sur le départ, ont seulement été d'aller consulter la Sybille, et quand il est arrivé près de la Sybille, tout ce qu'elle a trouvé à faire cette nana, ça a été de l'emmener faire du tourisme dans le monde des morts.

D'où il découle que Virgile nous fait une très belle description des Enfers, et surtout de la partie où séjournent les âmes qui, sans avoir été ni vraiment mauvaises, ni vraiment bonnes, ni vraiment malheureuses, ni vraiment glorieuses, ont seulement soif d'oublier les peines et déceptions de leur vie et boivent pour cela l'eau du fleuve Léthé qui passe là... Mais au fur et à mesure qu'elles oublient leurs peines, leur revient l'envie de vivre.

2011-09-28-b

Dans cette même partie des Enfers on peut rencontrer les héros de l'avenir qui se promènent. Enée rencontre ainsi quelques-uns de ses descendants parmi lesquels Romulus et Jules César. Le voilà rassuré ! Son voyage ne sera pas un échec...
Il empruntera, pour ressortir, la "porte d'ivoire" par laquelle, la nuit, les fantômes peuvent aller hanter les dormeurs.
Dans les univers celtes, les voyages au monde des morts sont à la fois plus et moins fréquents, du fait qu'on ne sait jamais très bien de quoi on parle... Le symbolisme celtique est particulièrement "piège".

Là où dans l'univers gréco-latin, le héros entre sous terre où il va croiser les monstres gardiens et tout ça, dans le monde celte, on ne sait pas très bien si on est entré ou si on est dehors, il peut y avoir voyage par bateau ou franchissement de rivière, mais ces choses peuvent aussi se produire sans que la mort soit en cause... La mort celte est étrangement douce et floue. Comme un voyage.

Est-ce qu'à une époque, il en a été ainsi chez les grecs et les romains ?
Dur à dire...
Je vais changer de sujet...

Voilà pas mal d'années est parue dans Okapi une BD nommée Snark Saga. (les éditions Okapi l'ont sortie en album, en ce temps-là). Snark Saga, ça commençait comme une histoire d'écologie et de lutte contre le massacre des baleines... Sauf que très vite, ça dérape, car des vaisseaux de guerre ont été attaqués par un monstre marin. Des scientifiques se mettent en route pour étudier la bestiole dans un nouveau modèle de batiscaphe. On se rend compte que les "snarks" sont plusieurs mais on y va quand même... Et nouveau dérapage: les passagers du batiscaphe se retrouvent dans une sorte de poche d'air souterraine où ils peuvent marcher sur les parois sans tomber et où tout ce dont ils ont besoin se matérialise. Quand aux snarks... Ils finiront par se rendre compte que les monstres qui ont détruit les bateaux de pêche et de guerre ont été matérialisés par l'inconscient de leurs propres passagers. Via le pouvoir des créatures qui vivent dans cette poche souterraine.

Elle était vraiment très bien cette BD... Des références à pas mal de choses, entre autres à Lewis Carroll.

Tout ça pour dire que l'idée d'un voyage par bateau n'exclut pas forcément que le monde des morts (ou des esprits) soit souterrain. D'ailleurs, il y a des rivières souterraines...

Mais en fait, ce changement de concept vient peut-être des rites funéraires? Une culture habituée depuis longtemps et de façon fixe à enterrer ses morts ou garder sous terre les cendres de ses morts verra logiquement le monde des morts "en-dessous". Et inversement ! Le monde "du dessous" c'est le côté qu'on ne voit pas, le côté où agissent les forces magiques qui font croitre les plantes mortes l'année précédente... Mais le côté "du dessous" c'est aussi le côté où se cache le soleil pendant la nuit... Et lui, il entre sous la terre en tombant dans la mer. Du moins, c'est ce qu'il fait quand on se positionne sur la côte Atlantique ou en Angleterre. Pour les peuples celtes d'Italie du Nord, surtout pour ceux vivant encaissés dans un fond de vallée, c'est plus délicat à dire.

Même en gardant les mêmes choses au même endroit... On n'obtient pas forcément le même résultat !

Je reviens en arrière...
Pour aborder la question non plus d'un point de vue géographique mais temporel.
Et parler de ces âmes qui, entrées lourdes de leurs peines accumulées tout au long de leur vie, s'en allègent durant leur séjour près du Léthé. Inutile de croire à la réincarnation pour croire à ce phénomène. Il suffit de penser que les personnes tristes et démoralisées peuvent "se régénérer" et retrouver une "nouvelle vie". L'image de la rivière qui efface et emporte les soucis n'est pas particulière à la mythologie gréco-latine.

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Les "héros de l'avenir"... Ce peut être l'espoir, bien sûr, mais il ne faut pas oublier que l'Enéide a été écrit à la gloire de Rome.
Est-ce que la cosmogonie romaine donnait vraiment à l'âme des héros une "fabrication" un peu plus soignée qu'aux âmes ordinaires (recyclées automatiquement via leur consomation d'eau du Léthé) ? Ces "héros de l'avenir" sont-ils une idée 100% Virgile en un temps où on les pensait des âmes parmis d'autres ? Est-ce que, même, la question avait une réponse ? Ou même se posait ?
Il y aurait une logique, dans l'esprit antique, à ce que les héros aient une âme différente de celle des simples mortels : ils ne sont PAS de simples mortels. Ce sont des "semi-dieux" (à ne pas confondre avec des demi-dieux, car ils ne sont pas toujours de naissance partiellement divine).

Je passe sans m'y attarder sur le secteur dit "du Tartare". Je suis bien certaine que vous n'avez pas grande envie d'y faire du tourisme.

Je passe également sur le secteur des "champs élyséens", séjour des bienheureux. A en croire certains de ceux qui y ont été admis, c'est un ennui mortel.

Mort

Moralité : si les dieux, à votre mort, ne vous offrent pas une coupe d'ambroisie, allez batifoler dans les champs fleuris et n'hésitez pas à boire autant d'eau du Léthé que vous en aurez envie... Si vous n'en avez pas envie, ne vous forcez pas. Vous n'avez que très peu de chances de mourir de soif une fois trépassé.

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